JULIA KRISTEVA

Exit

Julia Kristeva
 

 

 

Julia-Kristeva-Renmin-ribao-Chine

 

Article de Julia Kristeva publié dans le Renmin Ribao 人民日报 (Le Quotidien du Peuple) pour le 50e anniversaire des relations diplomatiques entre la France et la Chine

 

 

史的飞跃:中法建交半世文化沉思

 

Une accélération de l’histoire

 

1. « Un État plus ancien que l’histoire… » (Charles de Gaulle)

Les démocraties modernes tentent de se ressaisir  en commémorant leur histoire : elles célèbrent la victoire de leurs valeurs (ainsi, le 8 mai 1945, date anniversaire de la fin de la Seconde guerre mondiale en Europe) ; elles se recueillent  contre la barbarie (entre autres, le 11 septembre 2011, attentat au World Trade Center, perpétré par les djihadistes d’Al-Qaïda). Rarement, les dates du calendrier diplomatique participent  de cette historiographie  refondatrice de la sociabilité universelle des nations.

Je vous propose de penser que le 27 janvier 1964 fait partie de ces moments-clés  qui ont accéléré l’Histoire : en tendant la main à la Chine, la France a rappelé au monde que les énergies européennes ne sont pas éteintes, et « l’ère chinoise commence » (prophétise André Malraux).

Ce ne fut pourtant qu’un bref communiqué, publié simultanément à Paris et à Pékin : « Les gouvernements de la République française et de la République populaire de Chine ont décidé,  d’un commun accord,  d’établir des relations diplomatiques. Ils sont convenus à cet effet de désigner des ambassadeurs dans un délai de trois mois. »

Un général visionnaire, Charles de Gaulle, a l’audace de défier  l’empire soviétique (les relations sino-soviétiques accusent une nette dégradation, suivie de rupture et de confrontations) et prend de vitesse de leadership américain (la diplomatie du ping-pong ne viendra qu’en 1971, l’échange des deux bœufs musqués de Nixon contre les deux pandas géants de Zhou Enlai n’aura lieu qu’en 1972, et c’est seulement en 1979  que les USA  et la Chine établiront des relations diplomatiques). Fier de proclamer un « événement capital sur le plan mondial », il fait scandale dans les chancelleries en  reconnaissant -  sans complaisance mais avec un respect appuyé pour « l’ardeur d’un peuple » - cet « Etat plus ancien  que l’Histoire, constamment résolue à l’indépendance, s’efforçant sans relâche à la centralisation, replié d’instinct sur lui-même et dédaigneux des étrangers, mais conscient  et orgueilleux  d’une immuable pérennité ». Telle lui apparaît « la Chine de toujours » qu’il salue sans illusions mais sans réserve aussi, car « le France reconnaît le monde tel qu’il est » et qu’ « avant d’être communiste, la Chine est la Chine ».

   Aurait-il lu Laozi 老子: « Gouverner un grand pays, c’est comme faire cuire de petits poissons » (entendons : ne pas le toucher et le tourner, car on risque de l’écraser) ? Il ne fait aucun doute : le général de Gaulle place le renouveau franco-chinois au plus haut niveau, c’est-à-dire sur le terrain de la culture. Le premier ambassadeur de France est un éminent universitaire et ancien ministre de l’éducation, Lucien Paye ; l’écrivain et ministre de la Culture André Malraux visite la Chine l’année suivante ; et le général lui-même appelle de ses vœux des « rapports féconds de peuple à peuple », basés sur les échanges économiques, industriels et techniques qui ne deviendront possibles, réels et prometteurs que grâce aux  « affinités qui existent  notoirement entre les deux nations pour tout ce qui a trait aux choses de l’esprit, compte tenu du fait  qu’elles se portent, dans leurs  profondeurs, sympathie et considérations réciproques » : autant d’atouts  qui conduisent les deux pays à « une croissante coopération culturelle ».

  Dans les soubresauts de la décolonisation, anticipant sur le Discours de Phnom Penh de 1966, la République française par la voix de Gaulle plaide pour le respect de la souveraineté nationale, afin de rétablir l’équilibre international, et annonce implicitement la nécessité de dépasser la  gestion bipolaire de la planète par ce qu’on appellera  plus tard une gouvernance multipolaire.

 Les cinquante ans qui nous séparent de ce moment ont vu s’affirmer les identités nationales, mais aussi régionales et, au-delà des frontières géographiques, les identités religieuses, sexuelles, individuelles, singulières. Quel équilibre international devient  aujourd’hui possible (ou pas), dans ce contexte de revendications et de croisements identitaires où la France avance prudemment avec l’Europe en crise endémique, tandis que la Chine - consciente de son ascension vertigineuse et encore incertaine de pouvoir l’assumer - est en train de se poser en centre de gravité mondial succédant à l’Amérique ?

 L’appel aux « choses de l’esprit » et à leur « profondeur » transversale  aux institutions politiques nous invite à inscrire dans l’agenda politique  la longue   durée de la mémoire culturelle propre aux  nations, aux traditions, aux religions, aux  créations personnelles. Quelles interactions entre la mémoire culturelle chinoise et celle de la France dans l’Europe ?

 

2. Voyage en Chine

Jeune étudiante en Bulgarie, mon pays natal, j’ai entendu les  vibrations de cette  première reconnaissance de la Chine  dans les débats qui passionnaient  les intellectuels, mes aînés. Un des grands critiques littéraires m’a fait lire le dialogue imaginaire qu’il  venait d’écrire entre Laozi et Confucius : des métaphores de deux sagesses philosophiques et politiques qui  se confrontaient et se complétaient, comme deux  variantes possibles d’une éventuelle gouvernance démocratiques après le « dégel » du stalinisme. Mais c’est en France, où je suis arrivée avec une de ces bourses d’études que le général de Gaulle, soucieux  d’une Europe de l’Atlantique à l’Oural,   donnait aux jeunes chercheurs des « pays de l’Est », que j’ai pris la véritable mesure de l’éveil chinois.  C’était deux ans après l’établissement des relations diplomatiques avec la Chine, je lisais à Paris la volumineuse encyclopédie « Sciences and civilisation  in China » de l’anglais    Joseph Needham, mai 68 devait bientôt bousculer les partis et le  pouvoir lui-même,   la « pensée du Président Mao » lançant la jeunesse et les femmes dans la Révolution culturelle en Chine séduisait beaucoup de révoltés et en agaçait d’autres, j’ai commencé à apprendre le chinois pour mieux appréhender cette civilisation énigmatique, la Chine devint membre de l’ONU en 1971,  et nous étions parmi les premiers intellectuels occidentaux à être invités à visiter le pays en mai 1974.

   Notre délégation dite « de Tel Quel », dirigée par Philippe Sollers, comprenait Roland Barthes, Marcelin Pleynet, François Wahl et moi-même (Jacques Lacan, qui devait être du voyage, ne put nous rejoindre au dernier moment). Rescapée du stalinisme, je m’intéressais  moins à la révolution qu’à la tradition culturelle, tandis que la « maladie chinoise »  des jeunes  écrivains et intellectuels, tel un symptôme qui révèle un désir, me paraissait exprimer l’effondrement en cours du totalitarisme de gauche en particulier, et de la sclérose de l’Occident en général, contre lesquels certains d’entre nous se disaient « enragés ». Nous parcourûmes Pékin, Luo-yang, Xian, Canton, Shanghai et d'autres bourgades moins connues : je me perdais dans la soie rose des cerisiers en fleur, je m'entraînais à déchiffrer la sagesse sur les stèles des temples taoïstes et des monastères bouddhistes, je me pétrifiais de respect dans l'Allée des Morts ou sur la Grande Muraille, mais mon objet d'observation principal restait les femmes modernes et bien réelles qui m'entouraient. C'était l'époque du féminisme à New York et à Paris, j’entrepris l’écriture d’un  livre sur Les Chinoises pour les Editions des femmes récemment crées (publié en 1975, épuisé en français, ainsi que sa traduction anglaise : About Chinese  Women, New York, Urizen Books, 1977, London, Marion Boyars, 1977 ; republié en français par Pauvert, 2001 ; et  en chinois 中国 Tongji University Press, 2010). Au carrefour d’une enquête culturelle et d’une inquiétude politique, j’écrivais : «  Si l’on ne s’intéresse pas aux femmes, à leur condition, à leur différence, on rate la Chine. »   Entre  psychanalyse   et anthropologie, c’était la diversité  humaine qui m’intéressait, et la question de savoir quelles gouvernances pouvaient se construire sur la Terre  en tenant compte des mémoires culturelles,  différentes  de notre héritage gréco-judéo-chrétien : par exemple,  si l'univers se disait en yin et en yang et s'il s'écrivait en idéogrammes.

   Le livre se présente donc comme une interrogation sur les fondements du pacte social  constitué par la différence sexuelle et le contrat entre les deux sexes. En parcourant  l’histoire  de la famille chinoise et le destin des femmes en Chine - de l’antiquité  jusque la révolution bourgeoise et le communisme -  je soutiens que les  diverses configurations des rapports  entre l’homme et la femme  conditionnent en profondeur la diversité des  éthiques, des croyances, des religions, du droit familial évidemment et, pour finir, des modes mêmes de représentation du pouvoir dans toute société. À une époque où la pilule et l'I.V.G. n'étaient pas encore autorisées en France, et où la mode n'était pas aux femmes ministres, la Chine, qui paraissait s'éveiller du Moyen Âge et sortir du modèle soviétique, offrait cependant une mosaïque de questions et de réponses qui ne pouvaient que stimuler la réflexion sur l'avenir du «deuxième sexe», non : de la «moitié du ciel ». Cette réflexion s’incarnait pour moi dans des thèmes d’intérêt personnel (la maternité, la famille, l’harmonie ou la guerre des sexes), que j’abordais  dans mes rencontres avec les femmes chinoises et dont j’esquissais les portraits. Consciente d’effleurer de gigantesques  problématiques historiales qui demeurent, autrement et non moins pesantes aujourd’hui, je me proposais simplement de les formuler, nullement d'y répondre : c'était ma façon à moi de me faire « Chinoise », un peu, quand même. Comme le pense Zhuangzi 庄子 : «Dans le plus grand Tao, rien ne s'énonce; dans la plus grande dispute, rien ne se dit; la plus grande bonté n'est pas bonne, la plus grande humilité n'est pas indigente, le plus grand courage n'est pas agressif. »

J'ai toujours été surprise par les attaques de ceux qui s'en prennent aux jeunes maoïstes de cette période, les chargeant d'incarner le totalitarisme le plus irresponsable quand ce n'est pas la criminalité la plus sanguinaire. Je n'ai pas connu ce genre de « maos ». Notre intérêt pour la Chine dont ce livre est issu, me paraît, avec le recul, comme une des premières fissures dans le « mur de Berlin» : le monde coupé en deux blocs après de la Deuxième Guerre mondiale est en faillite,  disions-nous en substance ; la globalisation était  déjà en cours dans nos  pensées et nos comportements ; et nous contestions d’emblée son universalisme  banalisant.  L'homme et la femme, l'esprit et le corps, la voix et le geste, l'oral et l'écrit n'étaient pas divisés de la même façon dans les différentes civilisations ; et la «pensée chinoise» (ou plutôt : l’expérience chinoise) dévoilait, à nos curiosités avides, d'autres potentialités pour le désir, pour le sens et pour la politique.

 Au retour, je me détachai pour longtemps de toute politique, en m'efforçant de chercher des réponses à mes interrogations dans l'intime : l'inconscient, la maternité, le roman. Je reste néanmoins persuadée qu'une modification du régime même de la politique passe nécessairement par ces refontes culturelles auxquelles nous invite le continent encore énigmatique de la civilisation chinoise, qui persiste vivant sous la nouvelle occidentalisation, technologique et consumériste actuellement en vigueur. Si la «diversité» ne reste pas lettre morte dans la globalisation en cours, prêtons attention à la culture des autres, et surtout à la Chine.

 Dans cet esprit, ayant créé en 2008 avec un groupe d’amis le  « Prix International Simone de Beauvoir pour la liberté des femmes », nous l’avons attribué en 2010 à deux femmes chinoises, la juriste Guo Jianmei 郭建梅 et la vidéaste et littéraire Ai Xiaoming 艾晓明, pour leur œuvres  en faveur des droits des femmes qui s’inscrit dans une  longue tradition chinoise de combat contre l’obscurantisme, pour l’émancipation et la créativité féminine.

Tout le monde sait désormais que la Chine sera la première puissance économique du prochain millénaire. Nul ne sait, en revanche, si et comment les idéaux des droits de l'homme pourront rejoindre une tradition dont les pinceaux raffinés, et non moins tranchants, se font remplacer par l’hyperconnexion numérique, mais qui n’ignorent pas nécessairement les exigences libertaires dont s’honore la culture européenne : qui leur donneront peut-être des développements  imprévisibles. Ces Chinoises, dont j’ai tenté de saisir la mémoire ancestrale et l'élégance fuyante, seront-elles tout bonnement les « managers » les plus accomplis du « nouvel ordre mondial », ou bien parviendront-elles à l'infléchir vers plus de subtilités, de différences, d'harmonies ? Je reste attentive, quant à moi, aux jeunes Chinois et Chinoises qui viennent à Paris pour étudier les molécules et les atomes, mais aussi pour tenter de lire Pascal et Diderot, Colette ou Sartre. Ils n'ont pas moins à apprendre de nous que nous d'eux. La liberté est à réinventer, par eux non moins que par nous, à partir de ces échanges.

Les futurs archéologues de cette liberté à recréer remonteront jusqu'à nous, quand ils feront l'histoire d'une rencontre que les Jésuites avaient entamée, que la mondialisation actuelle prétend banaliser, et que seules les tentatives risquées d'un rapprochement culturel rendront, à la longue, possible.

       3. Europe/Chine : réhabiliter la culture dans une nouvelle philosophie politique

Une quatrième crise se confirme, sous-jacente aux crises financières, économiques et sociales : la crise de civilisation, métaphysique, anthropologique.  Et la nécessité s'impose d'inventer une nouvelle philosophie politique.

Fédérer la multiculturalité ne signifie pas mettre les cultures « à portée de main » sur Internet ou à l'Exposition universelle de Shanghai,   « foire aux diversités » et « spectacle généralisé ». À force de s'empiler les unes sur les autres dans une tolérance politically correct, les cultures  perdent leurs spécificités, leurs interprétations spécifiques dans la vie psychique de chacun,  leurs fécondations mutuelles. Prenons garde : une banalisation des diversités en résulte, qui est en train de devenir le nouveau « mal radical ». Plus sournois que le « heurt des religions », plus difficile à défaire parce qu'il réduit l’expérience de  penser en  « produits » du marché, il facilite l'automatisation en cours de l'espèce humaine.

   C'est à ce point précis que le « Sommet transculturel Europe/Chine », organisé par la Commission européenne à Bruxelles les 6  et 7 octobre 2010 prend tout son sens. Avec la présence  du Premier Ministre Wen Jiabao, du Président du Conseil européen  Herman van Rompuy et du Président de la Commission européenne  José Manuel Baroso,   nous étions une trentaine d’artistes, écrivaines, philosophes européennes et chinois pour insister sur la possibilité et l’urgence  d’ouvrir un chantier permanent de rencontres culturelles  Europe/Chine. Pourquoi ?

 

D'abord, parce que c'est dans le complexe continent de la culture européenne, malgré et peut-être à cause des excès voire des crimes commis et abjurés, qu'est en train de s'élaborer une mise en question de la « culture spectacle », de l'« animation culturelle » et de cette « culture foire aux diversités » qui tend à banaliser le fait culturel lui-même. Ensuite, et surtout, parce que la Chine comme l'Europe ont besoin d'affirmer leur autonomie politique et économique, en l'appuyant sur le caractère spécifique de leur culture : à décomplexer leur héritage civilisationnel par une analyse approfondie de leur mémoire culturelle et sa « transvaluation » (Nietzsche).

 

 C'est aux sciences humaines et sociales, avec la participation de chercheurs européens et chinois, qu'il revient de définir et d'approfondir quelques axes d'échange prioritaires entre les diversités de nos cultures, tels que nous les imposent la mémoire des deux civilisations et l'actualité internationale. Voici quelques unes de ces problématiques axiales :

- Qu'est- ce qu'une identité nationale et culturelle ? L'Europe a inventé la nation et l'a ensuite léguée au monde globalisé. L'émergence du nazisme a entraîné avec forte raison la condamnation de la nation. Pourtant, ignorer l'identité nationale, c'est exposer les peuples à une véritable dépression nationale dont les conséquences se reconnaissent dans les crispations nationalistes. Les échanges entre l'Europe et la Chine pourraient faire ressortir la portée et les limites de cet antidépresseur qu'est l'identité nationale, de telle sorte que les nations se redéfinissent selon les principes d'une gouvernance multipolaire.

 Au culte moderne de l'identité, la culture européenne oppose une quête identitaire toujours à recommencer. Sur le Vieux Continent, l'identité est un questionnement, que nous devons porter auprès de nos partenaires chinois, pour mieux comprendre aussi bien les revendications ethniques et nationales au sein de leur immense continent, que celles des différents peuples et pays des autres zones géographiques dans le monde globalisé. Dans l'espace européen, la nation et la liberté sont soumises à une analyse, voire à une recomposition inouïe. Sommes-nous en mesure d'assumer ces évolutions au point de les faire entendre jusqu'à la Chine ? Le futur Européen sera-t-il un sujet singulier, au psychisme intrinsèquement pluriel parce que polyglotte, ou un sujet réduit au globish english ? C'est dans cette perspective que se pose dans la Chine elle-même autant la question des langues régionales que celle de la place des langues étrangères dans l'enseignement face à la globalisation.

- La différence entre les deux modèles dominants de la culture dans le monde occidental, l'européen et le nord-américain, est devenue sensible avec la chute du mur de Berlin en 1989. Ces deux modèles sont fondés sur deux conceptions de la liberté, à la fois différentes et complémentaires, qui sont à l'œuvre dans les institutions internationales en Europe et aux États-Unis. L’un, issu de Kant et du protestantisme, privilégie la liberté comme  « auto-commencement » et culmine dans la « libre entreprise ». L’autre privilégie  la quête identitaire infiniment reconstructible, favorisant la singularité, à l’encontre des certitudes et de l’ « inanimation » qu’imposent les impératifs économiques. La société européenne, avec et malgré ses crises endémiques, n’est pas en retard mais en avance sur la crise mondiale, dans la mesure où elle tente de se construire en tenant compte de la logique de la globalisation, sans pour autant se réduire au libéralisme du « laisser-aller », souvent identifié au « modèle américain ». Le souci du singulier constitue la seule réponse à la massification des diversités, sans les priver de leur rôle inévitable de consommateurs du « free market », mais en cherchant les équilibres les plus justes à un moment historique donné.

- L'approfondissement de la liberté singulière passe par l'attrait qu'exercent les religions et les spiritualités sur les consommateurs de la globalisation. La connaissance, l'analyse, la « transvaluation » des cultures, des religions et des spiritualités constituent une priorité essentielle pour l'Europe comme pour la Chine. Cette problématique commence à se faire entendre, comme en témoigne la création de l’Institute for advanced european studies  欧洲文化高等研究院 de l’Université Jiaotong à Shanghai qui ouvre des recherches sur ces sujets difficiles avec  une forte coopération européenne.

- La place de la femme et du féminin dans la tradition chinoise, du taoïsme et du confucianisme en passant par le socialisme chinois et le marxisme, confère aux femmes chinoises un rôle décisif dans le développement actuel du pays et au regard de l'émancipation de toutes les femmes dans le contexte de la globalisation. Quelle différence avec la situation des femmes dans d'autres parties du monde ! Et quelle longue marche reste encore à faire ! La culture de la maternité, la place de l'enfant, ou encore celle de l'égalité politique et professionnelle dans l'esprit d'une complémentarité entre les deux sexes sont de toute évidence des thèmes centraux, sur lesquels l'expérience chinoise et l'expérience européenne ont beaucoup à apprendre mutuellement.

                   4. Cinquante ans… et après ?

 Cinquante ans après l’établissement des relations diplomatiques France-Chine, la vitesse de la transformation chinoise fascine et interroge. Mes contacts, hélas trop rares, avec les intellectuels  chinois, m’ont convaincue que des nouvelles variantes de l’art de gouverner se cherchent en Chine, avec et à travers l’écart entre votre dynamisme économique  d’une part et les pesanteurs institutionnelles de l’autre, qui menace la cohésion sociale  L’ « ascension pacifique », la « société harmonieuse », le « Beijing consensus » du « développement » qui remplacerait le « Washington consensus » perçu comme une « démocratisation forcée », etc. ne pourront ouvrir une  nouvelle voie sociopolitique qu’en libérant la circulation de la parole. Et à condition que l’ « harmonie » - en accord avec la leçon confucéenne - ne se confonde pas avec la « conformité », mais que l’art de gouverner cultive la diversité, à l’instar de l’art musical et culinaire, intégrant la polyphonie des voies et des saveurs.

En Europe comme en Chine, le nationalisme  surgit lorsque le débat politique est frustré ou dans l’impasse ; la corruption  explose  quand la violence, ne trouvant pas de sens dans le projet culturel ou politique,  s’engouffre dans le « commerce » et la « guerre » ; et la pollution nous  étrangle quand la ruée vers le gain qui oublie la justice… Ces fléaux nous sont communs. Que faire ? 

« La loi ne tombe pas du ciel, n’émerge pas du sein de la terre ; surgie de la société, elle fait retour à l’individu pour qu’il se corrige  de lui-même. »  N’est-ce pas  une sorte de sagesse humaniste à la chinoise que formule ainsi votre Wenzi 文子?

Le troisième millénaire ne sera pas  s’il n’ose pas  cette continuelle refondation de l’éthos politique, qui consiste  à former - sans discontinuer - le citoyen dans chaque chinois, dans chaque européen, dans chaque être parlant. Pour harmoniser (au sens confucéen ci-dessus du terme)  l’individuel et le collectif, le singulier et l’universel… Pour commencer,  rappelons tout simplement aux  bureaucrates, de Bruxelles et de Pékin, d’ouvrir leur réunion en réfléchissant sur l’étymologie des caractères dans le mot chinois pour « gouverner » : zheng zhi政治 : endiguer et canaliser les eaux débordantes (des passions humaines, des techniques, des flux et vibrations cosmiques…). 

Permettez-moi de finir sur un ton grave. Comme beaucoup d'entre vous, je suis souvent désespérée par la dévastation calculatrice des esprits, par l'automatisation techniciste de notre espèce humaine, par l'apocalypse écologique. Mon voyage récent en Chine ne m'a pas délivrée de ces inquiétudes, loin s'en faut. Mais ni une autre guerre mondiale ni une nouvelle foi ne pourront nous sauver. Il nous reste à inventer une philosophie politique qui donne toute sa place à la rencontre culturelle, mieux : qui l'installe dans l'intimité de chacun. Ce pari n'est pas un optimisme de façade en désespoir de cause. Il doit être à la hauteur de ces dangers qui nous assaillent de toute part. Mais je le désire aussi à la hauteur des latences de nos deux cultures dont nous sommes capables aujourd'hui d'apprécier aussi bien les risques que les promesses.

 

JULIA KRISTEVA

Renmin ribao, Renmin luntan(人民论坛),  11 décembre 2014

 

JK

史的飞跃:中法建交半世文化沉思

2014-12-11 10:45 源: 《人民·前沿》201411月下 作者: 茱莉·克里斯蒂娃

 

 

【摘要】1964127日, 在和中握手洲“开启了中时代”。在中法建交五十年后,中的速度令人迷,也耐人味。法洲陷入局部性的危机,慎前行,而中同美世界上重要的一两国在思想方面有的相似性,在思想深都互有好感、相互尊重。中洲一,需要依靠其自身的文化特性,明政治和经济的自主性,并且通过对自身文化记忆的深入分析与“重估”,对自己文明遗产的信心。人了第四次危机的,能拯救我们的,并不是一新的世界大,而是一种新的信仰。我们需再造出一种面向文化对话的政治哲就要求人们对这种文化的予足

键词中法建交  文化对话  第四次危机  新政治哲

“一比历史要古老的度……”

代民主制度通过纪念自身的历史,试图让自己安心:她自身价观的利(比如,194558日,第二次世界大战洲战场停战的日子);也反思其与野力量的搏斗(尤其是2011911日,基地袭击世中心的纪念日)。管有时候任何因素都具有定性影,但是外交史上具有志性的一些日子,很少能在世界上各民族交往的新的历史篇章中上一

1964127日就是这个关键性时刻,它推了历史的展:在和中握手时,提醒了世界洲活力尚在,并准作出新的择,用罗(Malraux)的话,就是“开启了中时代”。

不过,这仅仅是一份在巴黎和北京同时表的明公:“法西共和政府和中人民共和政府,一致定建立外交系。为此,方在三互相派大使。”

然而,这寥寥,表明了夏勒·戴高Charles de Gaulle)这位高瞻领导人,勇于挑战苏联时中系已明显恶化,不久系就底破裂,陷入论战),追赶美1971年中美两国开始了谨慎的所乒乓外交,到了1979年才正式建交),挑起理府大对立阵营

,戴高乐敬仰的正是“古不的中”(这“比历史还要古老的度,定不移地追求立,而不舍地中央集,天生擅自我反思,对外人不屑一古不的永感到傲”),在这番微妙的赞扬中,我们可以解出想要化解与共产主家建立外交系的:不论前的意为何,中依然是那

难道他曾读到过老子说过的“治大若烹小”这句话(这句话的意思,是说煮时不要去翻它们,因为有可能把它们弄碎)么?毫的是,戴高乐军把中法系的复提到最高的高度,也就是“文化面”(le terrain de la culture)。同一年,前教育部,同时也是秀的大师吕西安·巴耶(Lucien Paye)被任命为首任法大使;第二年,安德烈·罗(André Malraux)本人,以文化部的身份访问中。因为如果戴高乐之为展“人民到人民的深厚系”的愿望,是基于方在经济、工和技术领域的交流的话,那么他为,多两国在思想方面有明显的相似性,在思想深都互有好感、相互尊重”,这一切才得可能、真切和有希望:两国有相多的有利件,展“一种不大的文化合作”。

在反殖民化蓬勃展的形下,作为1966年金谈话的铺垫,法兰西共和通过戴高乐的音,呼吁尊重家主,以便平衡秩序,也含沙射影地表了,通过后来称之为多极化的治理超越全球极化管理的必要性。

我们相隔五十年后看到,这些话肯定了家和地认同,同时也突破了地理、宗教、性体和特定的界。法洲陷入局部性的危机,谨慎前行,而中(即便意识到自己尚不能适这种急速展)则同美成为世界上重要的一级,在这种各方都有不同求,同时又有身份认同交的背景下,有可能(或者有可能)建立平衡

对“精神性的西”,及其在向的政治制度中的“根基”的追诉,要求我们与民族、、宗教及人创造相时段的文化记忆,与政治考察相合。中的文化记忆,与法洲的文化记忆之,有可能产生什么的互?

一名保加利青年生的中之行

作为一名自保加利的青年生,我曾听说中法建交在思想界前论中引起了震时一种主流的文,促使我去读老子和孔子之匿对话:位哲和政治方面的先哲的隐,互为照又相互充,可以作为斯大林主之后“解”时期,民主治理的种可能的途。但正是在法,我理解了中醒的真正途,我靠一份法金的到法国学,戴高乐军心系大西洋到山的整个欧洲,他立了一些资助“家”的青年研究者的奖金。正是在与中建交的年后,我在巴黎读到了李瑟(Joseph Needham)卷帙浩繁的百科全式的英文著作《中的科与文明》(Science and Civilisation in China),习中文,但是与我的多同代人相反的是,中更令我迷的是富有神秘色彩的文明,而不是毛主席发动的“文化大革命”。我自共产主阵营的家,但我自认为“幸免于”斯大林主,也有患上“中病”,在1968年“五月暴”的背景下,与我同代的知识分子大都对此有免疫力。中我现了一种愿望的征兆,以及在我看是集台时的革命激情,尤其是在左派人士那里,与此同时,西方的民主制在体上也于僵化,用我们中那些反对它的人的话说就是“了”。

1974年,在中成为常任理事三年后,我跟所谓的要“地考察”的代表应邀访问中。由菲利普·所来尔思(Philippe Sollers带队,成包括罗兰·巴特(Roland Barthes)、塞林·裴勒奈(Marcelin Pleynet)、弗朗索瓦·瓦勒(François Wahl)和我,本雅克·拉康(Jacques Lacan)也是要去的,他在最后时刻能成行。我们访问了北京、洛、西安、广州、上海,以及另外一些不太知名的小地方:我迷于用花染成的玫瑰色的绸缎道观和佛教寺里的碑文中所涵的智慧,惊于皇陵甬道和城的恢宏,不过我主要的观察对象还是我身那些真的现代女。时在约和巴黎正是女性主的时代,我正手为一家成立的出版社作一本名为《中妇女》(Les Chinoises)的著作(法文版,Les Éditions des femmesParis1975;英文版About Chinese WomenNew YorkUrizen Books1977LondonMarion Boyars1977;中文版《中妇女》,同出版社,2010)。于文化考察和政治焦的十字路口,我道:“如果人们对妇女及其生存境和差异不感趣,那么也就错过了中。”通过心理分析和人的交叉研究,我感趣的正是人的多性,想要探讨的问题是,在与我们的希腊—太—基督教传不同的文化记忆的基上,建立起了一种什么的治理模式。例如,认为宇宙是由“”和“”组成的,就用有表意文字

因此,这本书的问是于建立在性差异基础上的社公约(le pacte social)的根基,以及性之的契约。通过考察中家庭的历史,以及中妇女的命古代一直到资产阶级革命和共产主时期),我坚持认为,男性与女性之不同形态的系,在深层次方面定了理、信仰、宗教,显然也包括家庭力在的各方面的多性,而最定了俗,甚至力在整中的表现形式。在一避孕胎在法尚被禁止,女性部也还有被社会广泛接受的时代,中似乎已中世纪的沉睡中醒了过苏联模式,提出了一系列问题和解方案,促使人们思考“第二性”:不,是“半天”的未。我把这方面的思考,具体为几自己感趣的研究主题(母性、家庭、性之的和与战),访谈这些中女性,然后描出一大概的廓。我有意识地触及这些大问题,但仅仅只是把这些问题提出,而不是要去回答它们:这是我自己研究“中妇女”的方式,管只是管。正如庄子所言:“夫大道不,大不言,大仁不仁,大廉不,大勇不忮。”

人们攻击那时代年的激进主者,认为是以最不负责任的方式具体表现了集,对此我是感到异,我并不了解这种型的“激进分子”。这本书中引申出的我们对于中趣,在我看,退一步看就像是“柏林”上出现的第一道裂说,是战后分裂出的大阵营衰落了。目前正在展的全球化,体现在我们的思想和行为之中;对平庸化的普世主我们也上产生。在不同的文明中,男性和女性,精神和身体,音和作,口语和作,也不是以相同的方式划分的;“中思想”(或者确切说:“中验”),为我们揭示了有欲念、感知和政治的其他可能性。

说回到我自己,期以我都游离于一切形式的政治,力在心寻找那些问题的答案,那就是:意识、母性和小说。管如此,我仍然相信,政体甚至政治的改造必过文化重塑,而文化重塑则要求我们注中文明这富有神秘色彩的大,我确信,在新一技术性和目前消盛行的西化浪潮中,中文明仍然具有活力。如果说“多性”在目前正在展的全球化中并非是一句空话,那么敬注其他文化,特是中文化。

这种精神,我在2008年同一群友人共同创了“西蒙·波伏娃妇女自由奖”(Prix international Simone de Beauvoir pour la liberté des femmes),我们在2010年把这奖项颁给了位中女性,法家郭建梅和影工作者、女作家艾明,以表彰她们在承中反对蒙昧主,倡导女性的解放和创造性的良传的基础上,而创作出的维妇女利的作品。

大家都知道,中国将在这新的千年成为世界第一大经济体。但是相反,却没有人知道,人标准如何与另一种传接。管互网已取代了精致、柔的毛,但这种传必定不认同洲文化引以为傲的极端自由主的主,人们也不知道这种连结是否有可能不可料的展。我试图在这些中妇女身上,抓住有先祖的记忆和已消逝的雅,她们已完全成为了“世界新秩序”最完美的“管理者”(managers),还是能让这种秩序朝更加合理、求同存异、和谐展的方向继续进步?至于我本人,一直留意那些巴黎求的中年轻人,论他们是研究分子和原子,还是阅读帕斯卡Pascal)、狄德罗(Diderot)、科特(Colette)和特(Sartre)的作品。他们我们身上到的西,同我们他们身上到的西一多。以这些交流为基础,他们如同我们一予自由以新的涵

在这种新创造的自由下培的考古家,想要作一部中相遇的历史时,追溯到我们这一代,耶开启了这段历史,目前的世界一体化又让它得平庸化,而唯有在文化上进行接合的尝试,才能使之有可能得悠远流

 

历史的飞跃:中法建交半世纪文化沉思(2

2014-12-11 10:45来源: 《人民论坛·学术前沿》201411月下 作者: 茱莉亚·克里斯蒂娃

字号:

欧洲与中国:在一种新的政治哲学中修复文化

人们已经证实了第四次危机的来临,这是比金融、经济和社会危机更深层次的危机,即文明、形而上学和人类学危机。因此,必须要创造一种新的政治哲学。

把多重文化性联合起来,并不意味着让文化变得在互联网上就唾手可得,或者成为上海世博会上的展品,而是要使之成为多样性的博览会普世性的风景。由于各种文化只要政治正确就能同时并存,文化也就丧失了自身的特性,对每个人的精神生活也没有了独到的解释,不同文化相互间也不可能擦出新的火花。请注意:这样导致的多样性的平庸化,会变成新的极端之恶。要比宗教冲突更可怕,也更难化解掉,因为思考的经验会被简化成市场的产品,这就会进一步使人类丧失主观能动性。

正是在这样的背景下,2010106日至7日欧洲委员会在布鲁塞尔举办了中欧跨文化峰会Sommet transculturel Europe/Chine),会议的议题是开放的。时任中国国家总理温家宝、欧洲议会主席赫尔曼·范龙佩(Herman Van Rompuy)和欧洲委员会主席若泽·曼努埃尔·巴罗佐(José Manuel Barroso)出席了会议,我们三十多位与会的来自欧洲和中国的艺术家、作家和哲学家,坚决主张要尽快搭建一个中欧文化经常性对话的平台。为什么呢?

首先,尽管(或许因为)欧洲文化中充斥着暴力,甚至犯下过(或者未遂的)罪行,但正是在欧洲文化这块纷繁复杂的大陆内部,目前对文化风景文化活力和有可能使文化事物本身变得平庸化的文化多样性产生了质疑。其次,尤其是因为中国同欧洲一样,需要依靠其自身的文化特性,证明政治和经济的自主性,并且通过对自身文化记忆的深入分析与重估(尼采语),来增强对自己文明遗产的信心。

正是由中欧学者共同参与的人文社会科学,才会重新定义和深入讨论双方文化差异中首要的核心问题,像我们不得不面对的两种文明的记忆,以及国际局势。以下是其中的几个关键问题:

第一,什么是民族和文化认同?欧洲创造了民族,然后把它留给了全球化的世界。如果纳粹主义让人们有理由谴责民族主义的话,似乎就无视了民族认同,这是把人民暴露在真正的压迫之下,其结果是被认为陷入了身份认同的紧张。中欧之间的交流,能够使民族主义这种兴奋剂的影响和范围更加突显,结果是民族会根据多极化治理的一些原则来被重新定义。

由于现代对身份认同的崇拜,欧洲文化总是要面临对身份的追寻。对于这个问题,我的中国朋友们的回答,会对这片广袤土地上的种族性和民族性的诉求作出解释。尽管如此,我们还是需要能够接受这种闻所未闻,但欧洲大陆又不得不面对的发展变化。未来的欧洲人,就多层次的内在心理而言,会变成单面人吗?因为能说多种语言的人,会变成只会说全球化英语(globish English)的人。正是从这种观点来看,中国也同样面临在全球化时,方言和外语在教学中处于何种位置的问题。

第二,西方世界中两种主导性文化模式之间的差别。在1989年柏林墙倒塌后,北美和欧洲变得不容忽视了。这两种模式是建立在两种不同,却又互为补充的自由概念之上的。一种自由源自康德和清教徒主义,更多地把自由视为一个自行开始的过程,在自由的事业中臻于至境。而另一种自由更多地是对身份的追寻,强调独特性,反对强制性经济强加的确定性和一致性。尽管欧洲社会存在局部性危机,但就欧洲社会内部试图建构全球化这一点来看,欧洲社会的危机并没有比世界性的危机来得晚,相反却提前来临了,但并没有向强大的自由主义彻底缴械投降,后者把人降格成了纯粹的消费者。

第三,宗教和修行对于全球化时代消费者的诱惑,欧洲人如此,中国人也一样,这无疑会带来文化重估的可能性,以及必要的文化接合。这方面已经开始进行筹划了,正如我们所看到的,上海交大的欧洲文化高等研究院(Institute for Advanced Study in European Culture),启动了一些高难度的研究课题,并与欧洲保持密切合作。

第四,妇女和女性在中国传统中的地位。经过中国特色的社会主义和马克思主义,受到道教和儒家文化影响的中国传统,在当前中国的发展中赋予了中国妇女重要的角色。这与世界上其他国家妇女的情况有着多少不同!又还有多少工作要做!母性文化、孩子的地位,甚或两性在政治和职业平等方面的互补思想,这些都是中国经验和欧洲经验需要好好相互学习的主题。

历史的飞跃:中法建交半世纪文化沉思(3

2014-12-11 10:45来源: 《人民论坛·学术前沿》201411月下 作者: 茱莉亚·克里斯蒂娃

字号:

五十年之后呢?

在中法建交五十年后,中国转变的速度令人着迷,也耐人寻味。很可惜我跟中国知识界的接触少之又少,经济动力和缺乏活力的体制之间的不匹配,会影响社会凝聚力,但中国知识分子让我们相信,中国正在寻找新的各种形式的治理艺术。除了和平崛起和谐社会北京共识这些寻求秩序的语汇外,通过言论的自由传播,将有可能找到一条社会政治的新道路。只要和谐(也就是孔子的说法)不与一致混为一谈,这种治理艺术将会有助于发展多样性,就如同百花齐放的音乐和烹饪艺术。

在欧洲和在中国一样,当政治论辩令人失望甚或陷入绝望之时,民族主义便会抬头;当在文化或政治规划中无处容身的暴力,充斥于商业战争中时,腐败便会滋生;当我们见利忘义之时,污染便会困扰我们……这些都是我们共同面临的灾难。那怎么办呢?  

法非从天下也,非从地出也,发乎人间,反己自正。文子不是如是道出了饱含中国智慧的人文主义解决方案了吗?

如果没有勇气对政治风气进行不断的重塑,(不断地)把每一个中国人、欧洲人和说话的人塑造成公民,那么在下一个千年仍然不会有任何进步。为了让个人和集体、特性和通性和谐共处(如上所述,按照孔子的说法)……只需要提醒布鲁塞尔和北京的官员,召开一次从词源上讨论政治这个汉语词汇的会议即可:面对(人和技术的各种复杂情况)采取疏堵结合的方式。

请允许我以严肃的笔调来结束行文。正如你们之中的许多人一样,我也常常对精神沦落、技术至上和生态危机感到绝望。但我最近的一次中国之行,却完全打消了我这方面的担忧。然而,能拯救我们的,并不是一场新的世界大战,而是一种新的信仰。我们需再创造出一种面向文化对话的政治哲学,最好是让这种政治哲学深入每个人的人心。这种做法并非是一种别无选择的乐观主义。应该对我们身边的这些威胁保持警惕。不过,我也希望人们对这两种文化的潜能给予足够重视,由此我们今天能够正确判断危机与机遇。

 

茱莉亚克里斯蒂娃

Julia Kristeva

 

http://www.rmlt.com.cn/2014/1211/357895.shtml

 
 
 

 

 

Julia Kristeva à Wuzhen, Chine en 2012
 
 
 

 

 

 

Article de Julia Kristeva publié dans le Renmin Ribao pour le 50e anniversaire des relations diplomatiques entre la France et la Chine

 

2014-12-11

 

RENMIN RIBAO RENMIN LUNTAN(人民论坛):
历史的飞跃:中法建交半世纪文化沉思

Julia Kristeva à Pékin, photo Sophie Zhang

Julia Kristeva à Pékin

photo © Sophie Zhang

 

 

 

 

France Chine

 

Changing History: Cultural Meditation on the Fifty Years of Sino-France Diplomatic Ties

Julia Kristeva

 

Abstract: On January 27, 1964, when France and China shook hands with each other, Europe "opened the era of China". Fifty years later, the speed of changes in China has become fascinating as well as meaningful. France and Europe are mired into a local crisis and move forward slowly, while China will join the US and become another important center of power in the world. The two countries have similar thoughts, and deep in heart they are interested in and respect each other. China and Europe both need to rely on their own cultural characteristics to prove the political and economic autonomy, and enhance their confidence in their cultural heritage through in-depth analysis and "revaluation" of their own cultural memory. It has been confirmed that the fourth crisis is coming, what can save us is not a new world war, but a new belief. We need to create a political philosophy oriented to cultural dialogue, which requires people to pay due attention to the potential of these two cultures.

 

Keywords: Sino-France diplomatic ties, cultural dialogue, the fourth crisis, new political philosophy

 

作者简介

茱莉亚克里斯蒂娃(Julia Kristeva),当代西方著名思想家、作家、心理分析师,巴黎第七大学(l'Université paris 7-Diderot)荣休教授,2004年荣获霍尔堡奖(Prix Holberg),2006年荣获汉娜·阿伦特奖(Prix Hannah Arendt)。研究方向为符号学。主要著作有《诗歌语言的革命》(La Révolution du langage poétique)等。

译者(le traducteur)

,巴黎政治学院历史中心博士候选人 。

 

 

>> L'Institut des études avancées sur la culture européenne de l'Université de Shanghai Jiao Tong, a également publié l'article de Julia Kristeva 欧洲文化高等研究院


twitter rss